ACTIONNARIAT SALARIE  -  LES MODELES

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  L'actionnariat salarié, c'est quoi? L'actionnariat salarié est le fait pour des salariés de détenir une participation dans le capital de l'entreprise qui les emploie. Cela commence avec un salarié détenant une action et cela peut aller jusqu'à 100% des parts détenues par l'ensemble des salariés.
Dans la forme la plus simple, un salarié peut utiliser une part de son épargne pour acheter des actions de son entreprise. Ou bien une personne crée une entreprise à laquelle elle apporte un capital et dont elle devient salariée. Au-delà de telles démarches individuelles, cela peut devenir un "plan" qui organise systématiquement la participation des salariés dans le capital de l'entreprise.
Un petit nombre de plans modèles d'actionnariat salarié existent dans le monde (mais avec de multiples variations en fonction des législations particulières de chaque pays). Ces plans sont plus ou moins adaptés aux entreprises en démarrage (ou micro-entreprises) ou aux PME ou aux grandes entreprises.
L'Europe compte environ 25 millions d'entreprises occupant 150 millions de salariés. Parmi celles-ci, 23 millions de micro-entreprises occupant de 0 à 9 personnes, 1.5 millions de petites entreprises occupant de 10 à 49 personnes, 250.000 entreprises moyennes occupant de 50 à 249 personnes, et 50.000 grandes occupant 250 personnes et plus (dont 2.500 cotées en bourse). Micro-entreprises, PME et grandes entreprises, chaque groupe occupe plus ou moins un tiers des salariés de l'ensemble, que ce soit à l'échelon européen ou dans chaque pays.


  Tout comme l'actionnariat des entreprises en général, les plans d'actionnariat salarié se répartissent en deux grandes familles, actionnariat individuel direct et actionnariat collectif indirect.

L'actionnariat salarié individuel direct correspond à ce qu'il y a de plus traditionnel et de familier lorsqu'on pense à l'actionnariat. Pour y parvenir, le salarié utilise une partie de son épargne ou de ses moyens financiers pour acquérir des actions ou des parts de l'entreprise, il y prend donc un risque personnel. Des plans de formes et de natures diverses permettent d'y arriver. Cette famille de plans d'actionnariat salarié est pratiquement la seule connue en Europe continentale.

L'actionnariat salarié collectif indirect est très peu pratiqué en Europe (sauf au Royaume Uni).

C'est ce qui explique pourquoi l'actionnariat salarié en Europe est presque inexistant dans les PME, pourquoi il est presque inconnu en dehors des grandes entreprises. En effet, les PME évitent généralement de multiplier leurs actionnaires, qu'ils soient ou non salariés. Elles n'y sont poussées que lorsqu'elles deviennent grandes. Par contre, une phase particulière peut conduire à la quête de nouveaux actionnaires, celle de la transmission d'entreprise. C'est pourquoi celle-ci est le moment le plus propice à l'introduction de l'actionnariat salarié dans les PME. L'actionnariat collectif indirect est la forme la mieux adaptée à la transmission d'entreprise aux salariés. Les plans de cette famille (ESOP, EOT) ont été conçus pour cela. Ils permettent aux salariés d'acquérir la propriété de leur entreprise, souvent à 100%, sans devoir y consacrer leur épargne ou leurs moyens personnels, donc sans risque personnel.
Les plans d'actionnariat salarié collectif indirect (ESOP, EOT) facilitent la transmission d'entreprises aux salariés, ce que les formes d'actionnariat individuel direct ne peuvent faire qu'à grand peine et à grands frais, l'épargne des salariés n'étant généralement pas à la hauteur.


    1 - Plan d'achats d'actions
Le plan d'achat ou de souscription d'actions est le plan le plus courant dans le monde pour l'actionnariat salarié dans les grandes entreprises. La participation des salariés est usuellement  encouragée par un rabais de 20 à 30% sur le prix de marché, avec en contrepartie une indisponibilité des actions à la vente pendant 2 à 5 ans. En France, cette indisponibilité se matérialise habituellement via un Fonds Commun de Placement d'Entreprise (FCPE).
En Europe, une grande entreprise sur deux organise périodiquement et de façon systématique des plans d'achats d'actions destinés à l'ensemble des salariés. En moyenne, le taux de souscription des salariés est de près de 40% en France, pas loin d'un salarié sur deux dans les grandes entreprises.

 
  2 - Stock options
L'option d'achat d'actions permet de différer l'achat des actions dans le temps, à un prix fixé d'avance. L'option devient actionnariat lorsque l'achat est effectivement exercé. Cette variante du simple plan d'achat d'actions offre un large éventail d'utilisations.
On connaît bien en Europe les plans de distribution d'options aux dirigeants et cadres, c'est le cas dans la plupart des grandes entreprises mais aussi dans beaucoup de plus petites.
Récemment, plusieurs pays européens ont adopté des mesures destinées à encourager l'usage des stock options dans les startups. L'exemple le plus impressionnant est celui de la Grande Bretagne, avec le dispositif de Enterprise Management Incentive lancé dès l'année 2000 en vue de faciliter le recrutement et le maintien des "talents" dans les PME. Après 20 ans de ce régime, on observe que près de 70% des actionnaires des PME ne sont autres que les salariés de celles-ci, à hauteur de 20-30-40% et plus. Cependant, cela ne concerne qu'une frange d'environ 10% des salariés de PME, en gros les dirigeants et les cadres.
Dans certains pays européens, les plans d'actionnariat destinés à l'ensemble des salariés ne sont pas des plans d'achats d'actions mais des plans d'achats d'options. De même, un des deux plans les plus populaires en Grande Bretagne pour l'actionnariat salarié dans les grandes entreprises (le plan SAYE) consiste pour les salariés à épargner pendant 3, 5 ou 7 ans avant de pouvoir  exercer leur option d'achat d'actions au terme de la période.

 
  3 - Actions gratuites
Tout comme les stock options, la distribution d'actions gratuites aux salariés est d'un usage très largement répandu dans les grandes entreprises européennes, sous différentes formes.
Généralement assorties de conditions de performances, elles sont un élément de rémunération pour les dirigeants et cadres, parfois en remplacement des stock options.
La distribution d'actions gratuites est une des trois modalités du plan SIP, le plus populaire pour l'actionnariat salarié dans les grande entreprises en Grande Bretagne. De même en France, les opérations d'attributions d'actions gratuites pour tous se sont multipliées dans les grandes entreprises.
La distribution d'actions gratuites à tous les salariés tend à se généraliser au moment des introductions d'actions en bourse (IPO).

 
  4 - Coopérative de salariés
Historiquement, la coopérative de salariés est la première forme de l'actionnariat salarié, puisqu'elle remonte à la première moitié du XIXè siècle. Elle en est toujours une des quelques références.
Par mimétisme avec l'actionnaire de l'entreprise capitaliste ordinaire, ce sont les salariés ici qui investissent une part de leur épargne. Ils en détiennent au moins 51% des parts, souvent à côté d'autres investisseurs. Fréquemment, le principe de gouvernance "un homme, une voix" y est préféré à la règle "une action, une voix".
En Europe, le gros de l'actionnariat salarié dans les PME se trouve concentré dans les coopératives de salariés. Celles-ci comptent quelque 750.000 salariés parmi lesquels 500.000  actionnaires salariés. Cependant, le secteur des coopératives de salariés n'a de dimension significative qu'en Italie, en Espagne (avec notamment le Groupe de Mondragon) et en France. Dans chacun des autres pays européens, les coopératives de salariés ne comptent que quelques dizaines d'unités tout au plus.
Partout en Europe, on observe un déclin du nombre de grandes coopératives de salariés.
Par contre l'attrait de la coopérative de salariés pour la création d'entreprise ne se dément pas, au contraire, tant pour des raisons de simplicité et de souplesse que de convictions.

 
  5 - Plan ESOP

Le plan ESOP ou Employee Stock Ownership Plan, - tout simplement "le" plan d'actionnariat salarié, imaginé aux Etats-Unis il y aura bientôt un siècle est en quelque sorte le père de tous les plans. Il prend des formes multiples, l'acronyme "ESOP" étant utilisé à tort et à travers partout dans le monde, d'où pas mal de confusion.
On se concentre ici sur le leveraged ESOP (ou ESOP à levier). Celui-ci vise à organiser la transmission d'entreprises aux salariés, à 15, 30% ou plus, souvent progressivement, et en général à 100%. Le financement ne vient pas des salariés eux-mêmes, mais d'autre part.
Pour rendre cela possible, on crée à côté de l'entreprises une deuxième entité juridique destinée à détenir les actions pour le compte des salariés. Cette structure duale permet d'acheter l'entreprise pour le compte des salariés via un financement extérieur, sans que ceux-ci en portent le risque financier.
Juridiquement, le montage est donc un peut plus complexe que celui de l'actionnariat individuel direct. En fait il est beaucoup plus simple puisqu'il rend possible ce qui serait autrement impossible, la transmission de l'entreprise aux salariés.
L'entité juridique détentrice de la propriété a la particularité d'être un organisme à but non lucratif (not-for-profit), généralement un trust dans les pays anglo-saxons, ou en Europe une fondation privée ou une fiducie, ce qui permet de bénéficier d'un traitement fiscal particulièrement avantageux.
Même si le trust est le détenteur des actions, les droits à la gouvernance et au partage des résultats peuvent être individualisés. Ainsi les salariés peuvent être associés à la gouvernance de l'entreprise, souvent même avec la règle "une action, une voix" pratiquée dans bon nombre de coopératives.
Le plan ESOP a été introduit dans la législation américaine en 1974. Par accident, cette législation lui a donné la forme d'un plan de pension, ce qui fait sans doute une bonne part de sa réussite. Aucune forme d'actionnariat salarié dans le monde n'a eu autant de succès, n'est aussi connue, observée, analysée.
                                                                                                                                               
Comment créer un plan ESOP


 
  6 - Employee Ownership Trust
La formule du Employee Ownership Trust, ou Trust d'Actionnariat Salarié a été introduite en Grande Bretagne par une législation de 2014.
Inspirée par le plan ESOP et avec le même objectif de faciliter la transmission d'entreprises aux salariés, elle est cependant beaucoup plus simple.
Avec le plan ESOP, le dispositif EOT partage la construction duale, permettant aux salariés d'acheter l'entreprise au moyen d'un financement extérieur sans en supporter le risque.
Par contre, il ne comporte pas l'arrangement de pension, ni le procédé  d'individualisation de la propriété des actions de l'entreprise, qui sont les caractéristiques du plan ESOP.
Cependant, tout comme dans le modèle ESOP, même si le trust est le détenteur des actions, les droits à la gouvernance et au partage des résultats peuvent être individualisés.
Ainsi tout comme avec le plan ESOP, les salariés peuvent être associés à la gouvernance de l'entreprise, souvent même avec la règle "une action, une voix" pratiquée dans bon nombre de coopératives.
Depuis son introduction en 2014, le nombre d'EOT n'a cessé de se multiplier. Aujourd'hui en Grande Bretagne, une cession d'entreprise sur vingt est faite aux salariés, une par jour environ, avec une taille moyenne de 80 salariés.
La formule du Employee Ownership Trust est aussi en train de se diffuser aux Etats-Unis comme alternative au plan ESOP, ainsi que dans le reste du monde.

 
  7 - Sociedades Laborales
Un plan espagnol qui a son origine dans la dépression économique sous le régime du Général Franco. Le premier cas suit la faillite de la société des bus de Valence. Celle-ci est reprise par ses plus de 3.000 salariés au milieu des années 1960. A partir de là, les cas de sauvetages d'entreprises se multiplient, avec un modèle sophistiqué de structure et de droits d'actionnaires tels qu'on ne les voit habituellement que dans les grandes entreprises.
Après la disparition du Général Franco, l'Espagne se redresse. Les demandes de sauvetages d'entreprises disparaissent du paysage. Dès lors les promoteurs des sociedades laborales proposent de se reconvertir à la création d'entreprises. Grand succès, avec un soutien financier public original, l'"activation" des indemnités de chômage: les chômeurs qui créent leur sociedad laboral reçoivent l'équivalent de deux années d'allocations, permettant de capitaliser leur entreprise. En quelques années, on parvient à plus de 20.000 entreprises en 2006, avec 130.000 emplois, soit 6-7 salariés en moyenne. Paradoxe d'un modèle conçu pour la grande entreprise qui trouve le succès dans des micro-entreprises.
Survient la crise en 2008. La lourdeur du modèle ne permet pas de rencontrer les besoins de recapitalisation des sociedades laborales en difficultés. En outre, le dispositif d'activation des allocations de chômage est étendu aux autres formes de création d'entreprises, les sociedades laborales perdent d'un seul coup leur attrait particulier. En quelques années, le nombre de sociedades laborales diminue de 60%, le nombre d'emplois est réduit de moitié et le nombre de créations de sociedades laborales est trente fois moindre qu'auparavant.

 
  8 et 9 - FCPE de reprise et SCOP d'amorçage
Deux tentatives françaises pour organiser la transmission d'entreprises aux salariés sur base d'actionnariat individuel direct. Le FCPE de reprise a été introduit en France par une législation de 2006, tandis que la SCOP d'amorçage provient de la Loi Hamon en 2014.
A fin 2021, il y a eu trois cas de FCPE de reprise en France en quinze ans, et un cas de SCOP d'amorçage en sept ans. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.

 

 

 

 

 


 

 


 

 

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